Fruit du génie créatif et du savoir-faire de Lucien Falize et de Germain Bapst, ce bracelet, en or, émail et diamants réalisé vers 1887 proposé par la Macklowe Gallery à New York, est le parfait témoin de ce partenariat hors du commun qui produira pendant quelques années seulement des bijoux d’une finesse et d’un raffinement exceptionnels.
Véritable chef d’oeuvre, le bracelet est réalisé en or jaune et rehaussé d’un émail d’une finesse exceptionnelle. Chaque motif est délicatement ciselé, la sophistication de cette ornementation témoigne de la maitrise absolue des techniques de l’émail et de la gravure. Dans sa face extérieure, le bracelet est décoré de médaillons représentant six espèces distinctes de fleurs (narcisses, oeillets, clématites, églantier, gustavia, pâquerettes) composées de diamants alternés par six espèces de feuillages (oranger, érable, chrysanthème, laurier, ancolie, érable negundo) ciselés et rehaussés d’émail rouge translucide sur paillons.
Le revers du bracelet quant à lui est émaillé en bleu clair, chaque médaillon contient une représentation en or ciselé de la même fleur que sur la face extérieure. On retrouve également des initiales : C et D avec la date du 15 mars 1887 ce qui laisse à passer que ce bracelet a été réalisé à l’occasion d’un mariage, et les initiales B et F pour Bapst & Falize. L’ornementation du bracelet et le choix des fleurs n’ont pas été laissés au hasard. En effet, chaque fleur, par sa symbolique renvoie directement à une vertu. Ainsi, la Macklowe Gallery a mené des recherches sur chaque espèce représentée.
Bapst & Falize, un duo d'exception
L’historien et joaillier Henri Vever qualifie Lucien de “savant, penseur et artiste”, ainsi que d’homme “au goût impeccable et […] au talent exceptionnel”.
En 1879, Lucien s’associe avec Germain Bapst. Selon Vever, ils n’étaient pas d’accord sur tout, mais se comprenaient parfaitement. Leur production, relativement modeste mais étonnante, figure dans de nombreuses collections de musées. Mais se rendant compte qu’il avait plus d’aptitudes pour les études historiques et artistiques que pour le commerce Germain Bapst quitte son associé Lucien Falize et lui abandonne la direction de l’entreprise. Toute sa vie, Lucien s’est efforcé d’innover et d’atteindre la perfection. Pour créer ces bijoux incroyables, Falize a collaboré avec plusieurs graveurs et émailleurs reconnus.
Outre son admiration pour le travail des artistes de la Renaissance et du Japon, Lucien aimait les plantes pour l’inspiration infinie qu’elles lui procuraient et étudiait la botanique. Des fleurs telles que l’œillet, le myosotis, la violette, la marguerite, le bouton d’or, le muguet, le pissenlit et l’iris apparaissent dans ses bijoux et objets décoratifs, ainsi que des feuilles de palmier, de mimosa et d’amande douce plus exotiques, et même d’humbles céleris et choux. Inspiré par l’attention particulière que les artistes japonais portent à la flore et à la faune apparemment insignifiantes, Falize écrit que “même le bois mort, en hiver, peut servir de modèle“.
Une production modeste mais de haute qualité
Ces objets de luxe, tout comme les œuvres entièrement faites à la main, étaient d’un coût exorbitant à produire. Le cas de Bapst & Falize, dont les bijoux étaient extrêmement raffinés, ne faisait pas exception. Malgré un travail sans relâche et de nombreuses commandes, les finances de Bapst & Falize étaient souvent précaires en raison du petit nombre d’artisans capables de produire un travail de cette qualité, ce qui induisait un coût très élevé de fabrication.
Un bracelet comme celui présenté dans cet article illustre parfaitement ce souci du détail et le soin apporté à la réalisation. Si l’on regarde le travail d’émail on se rend tout de suite compte de la complexité et du savoir-faire nécessaire pour obtenir un rendu satisfaisant. Des émaux translucides comme ceux-ci ont été créés grâce à la technique très complexe de l’émail paillonné, dans laquelle de minuscules feuilles d’or sont placées une à la fois entre plusieurs couches d’émail.
Élément remarquable de ce bracelet, outre sa finesse d’exécution, c’est le souci de la recherche de la symbolique des fleurs et feuillages utilisés. En effet, pour aller plus vite et faire des économies il aurait été possible d’uniformiser le bracelet en reproduisant la même chose à chaque fois mais ici les deux joailliers vont beaucoup plus loin en mettant en avant leurs connaissances poussées de la botanique. Chaque espèce est choisie pour sa symbolique liée à l’amour avec des renvois à la beauté, la pureté, l’amitié, la fécondité, l’innocence ou encore l’amour pur.
Une pièce de cette qualité et de ce niveau de raffinement ne se retrouve bien évidemment que dans des bijoux anciens. Des bijoux de cette qualité signés Bapst & Falize sont extrêmement rares sur le marché car beaucoup se trouvent dans des collections privées ou dans des musées. Pour en savoir plus sur ce bracelet n’hésitez pas à visiter le site de la Macklowe Gallery.