La Lechuga est un chef-d’œuvre d’orfèvrerie religieuse du XVIIIe siècle, considéré comme l’un des ostensoirs les plus précieux et impressionnants jamais réalisés. Son nom, signifiant “La Laitue” en espagnol, provient de l’abondance d’émeraudes qui recouvrent sa structure en or massif. Conçu par l’orfèvre espagnol José de Galaz entre 1700 et 1707 pour la Compagnie de Jésus, cet ostensoir est un témoignage exceptionnel du savoir-faire colonial mêlant influences européennes et artisanat indigène.
Un chef-d'œuvre baroque au service du sacré
Il est largement admis que les jésuites ont commandé la fabrication de La Lechuga afin de dissimuler les pierres précieuses qu’elle contenait aux yeux de la Couronne espagnole. Pour réaliser cette œuvre d’exception, ils firent appel à l’orfèvre espagnol José de Galaz, qui travailla avec deux autres artisans entre 1700 et 1707. Le coût initial de cette commande fut de 1 100 réaux, soit l’équivalent de 100 000 dollars en 1996. Lorsque José de Galaz acheva l’ostensoir le 16 juillet 1707, il estima sa valeur à 20 000 réaux, une somme colossale correspondant à environ 2 millions de dollars en 1996. Cette pièce d’orfèvrerie hors du commun est rapidement devenue l’un des trésors les plus précieux de l’Église catholique en Amérique latine.
La Lechuga : une composition exceptionnelle
La structure de La Lechuga représente un soleil flamboyant, symbole central dans l’iconographie chrétienne, entouré de 22 rayons sertis d’émeraudes et de 20 autres ornés de perles baroques. Au centre, l’hostie est placée dans une lunule entourée de 63 rayons plus petits, tandis qu’un ange sculpté en or soutient l’ensemble avec des ailes déployées et des bras levés vers le ciel. La base, richement décorée, intègre des motifs de feuilles d’acanthe, de vignes et de figures animales, révélant une influence stylistique mêlant l’art baroque européen et les traditions indigènes colombiennes.
La Lechuga a été conçue en or massif de 18 carats serti de 1 759 pierres précieuses dont 1 486 émeraudes issues de la mine de Muzo, 168 améthystes, 62 perles, 28 diamants, 13 rubis et un saphir.
Une histoire mystérieuse et fascinante
La Lechuga fut conservée dans l’église San Ignacio de Bogotá jusqu’en 1767, année où le roi Charles III d’Espagne expulsa les jésuites de toutes les colonies espagnoles. Afin d’éviter la confiscation par la Couronne, l’ostensoir fut caché pendant plusieurs siècles, disparaissant complètement des archives officielles. Ce n’est qu’en 1985 qu’il réapparut lorsque la Banque de la République de Colombie l’acquit pour 3,5 millions de dollars afin de le préserver en tant que trésor national.
La Lechuga, un trésor préservé au Musée d’Art Miguel Urrutia
Aujourd’hui, La Lechuga est exposée au Musée d’Art Miguel Urrutia à Bogotá, où elle attire de nombreux visiteurs et chercheurs fascinés par sa magnificence. Considérée comme l’un des plus beaux exemples d’orfèvrerie coloniale d’Amérique latine, elle incarne à la fois l’excellence technique de l’époque et le raffinement des matériaux précieux exploités en Colombie, notamment ses célèbres émeraudes.